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Dossier : Nintendo était-il contraint de vendre Rare ?

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Un des épisode fâcheux de Nintendo avec ses fans fut la vente de Rare. Annonce assez brutale, d’autant plus que l’acheteur n’était pas inconnu du monde du jeu vidéo : Il s’agissait de Microsoft ! Vécu par beaucoup de fans (dont moi) comme une trahison de Nintendo, on se demande tous ce que serait Rare à l’heure actuelle s’il était resté sous le giron de Nintendo… Mais cette vente n’aurait-elle pas tout simplement pu être évitée ? Pourquoi Nintendo aurait-il vendu l’un de ses rare studio européen ?

La naissance de Rare

Rare de 1994 à 2003

Rare de 1994 à 2003

Rare est né en 1982 en Angleterre, sans affiliation avec Nintendo, sous le nom de ACL, pour Ashby Computer & Graphics. Sa particularité ? Être l’un des premiers développeurs en Europe à développer exclusivement sur NES, chose que Nintendo va très vite remarquer… L’une des licences émergente de cette époque fut Battletoads, que certains d’entre vous doivent connaitre…

C’est surtout sur la SNES que Rare va se faire connaître des joueurs, grâce aux graphismes révolutionnaires à l’époque de Donkey Kong Country… Dont les graphismes sont réalisés sur des stations Silicons Graphics (enfin selon les rumeurs) avant d’être intégrés sous forme de sprites sur SNES !

Par la suite, Rare réalisa un nouveau projet, en interne cette fois-ci, de façon totalement indépendante, avec Killer Instinct sur SNES, que pas mal d’entre vous connaissent, ne serait-ce que par rapport à la nouvelle version sortie sur Xbox One

Ça ne paye pas de mine de nos jours, mais quand ce jeu fut l’une des raisons pour Nintendo d’investir sur Rare. Ainsi, la firme japonaise acquit 25% des parts de Rare… Nintendo a même continué d’investir par la suite jusqu’à 49% du capital de Rare, en n’en prenant donc jamais le contrôle (51% restant appartenant aux fondateur du studio), mais ce n’était pas nécessaire, car Rare bénéficiait du soutien sans faille de Nintendo, tout en restant indépendant de la firme japonaise…

Les années de gloire (amour et beauté)

Une fois la SNES passée, arriva la N64 en 1996. Et c’est sur cette période que Rare eut le plus de projet. Voyez plutôt :

1996
  • Killer Instinct Gold
1997
  • Blast Corps
  • GoldenEye 007
  • Diddy Kong Racing
1998
  • Banjo-Kazooie
1999
  • Jet Force Gemini
  • Donkey Kong 64
2000
  • Perfect Dark
  • Mickey’s Speedway USA
  • Banjo-Tooie
2001
  • Conker’s Bad Fur Day

Une liste de hits qui prouve les talents indéniables de l’équipe ! S’ils ont commencé avec un simple portage de Killer Instinct, les tensions commencèrent à arriver avec l’excellent Diddy Kong Racing, jugé moins bon qu’un Mario Kart (ce qui est vrai en terme d’accessibilité, mais pas de diversité, c’était la première fois que l’on pouvait avoir des courses mêlant avions, voitures et aéroglisseurs) par Shigeru Miyamoto lui même… Si le carton Goldeneye 007 n’aura échappé à personne, cela ne met pas Rare à l’abris du regard avisé de Monsieur Miyamoto… Qui jugea cette fois-ci Banjo Kazooie trop proche d’un Mario (mais techniquement bien supérieur, il faut l’avouer)… Il n’en a pas fallut plus pour provoquer dès 1999 le départ de l’équipe de programmeurs responsable du moteur de Goldeneye (qui ont créé Free Radical Design, studio responsable de l’excellent TimeSplitters), mais cela n’a pas non plus empêché Nintendo de confier la licence Donkey Kong 64 à Rare… Qui en a d’ailleurs fait LE meilleurs épisode en véritable 3D de la série Donkey Kong (sans compter les Country Return ou Tropical Freeze en 2.5D bien sûr), puisque c’est également le seul à être sorti !

La suite ? On la connait : les tensions entre Rare en Nintendo deviennent de plus en plus vive, Perfect Dark est un succès d’estime (mais pas en ventes avec ses 2,5 millions d’exemplaires vendus), Banjo-Tooie reste une excellent jeu de plateforme boudé par Nintendo, et Conkey’s Bad Fur Day n’a pas du tout plu à Nintendo, qui a carrément refusé d’éditer le jeu, obligeant Rare à  se tourner vers THQ pour distribué le jeu… Les relations sont alors au plus bas avec Nintendo.

Enfin, je dois vous avouer que je me pose tout de même la question de savoir si ce jeu n’était pas non plus une provocation de la part de Rare. Un jeu Nintendo avec un héro qui bois, fréquente des prostitué, adore insulter et parler crûment et qui est tout mignon… Si Nintendo possédait 51% des parts de Rare, il est quasiment sûr que le jeu aurait été annulé au stade de projet…

C’est l’caca, comme aimerait si bien le dire Conker…

Rare, de 2003 à 2010

Rare, de 2003 à 2010

Après quelques projets sur GameCube (StarFox Adventure), c’est le 24 septembre 2002 que la nouvelle tombe : Un accord entre Rare et Microsoft a été trouvé ! Nintendo a vendu Rare ? C’est ce que laisse penser les journaux et les sites de l’époque, avec en plus l’annulation de jeux prometteurs comme Donkey Kong Racing sur Gamecube…

Et pourtant, bien que les relations de Nintendo s’était envenimés, ils semblait tout de même avoir trouvé des accords, puisque Nintendo semblait préférer confier des licences à Rare plutôt que de les laisser en développer des nouvelles… Certains jeux, comme Diddy Kong Pilot sur Gameboy Advance, furent sauver, et tout de même éditer par… THQ encore une fois ! Assez étrange pour un jeu estampillé Donkey Kong, vous ne trouvez pas ? Mais les fait étaient là : Microsoft a réussi a acquérir Rare ! Comment ont-ils fait ?

Microsoft a tout simplement signé un accord avec les fondateur de la Rare, les frères Stamper, qui leur ont cédé leur parts (51%) ! Le reste est assez évident : Il aurait été difficile pour Nintendo, actionnaire non majoritaire de Rare, de contrôler cette structure, puisque Microsoft et ses 51% d’actions aurait eu un droit de veto sur tous les projets de Rare… La solution fut assez simple : Nintendo choisi de vendre ses 49% pour 377 millions d’euros (pour vous donner un ordre d’idée de ce que ça représente, le bénéfice de Nintendo pour l’année qui se clôture est de 220 millions d’euros), tout en ajoutant une clause interdisant à Rare d’utiliser les licences de Nintendo. C’est ainsi que Microsoft acquit 100% de Rare. Il se dit, dans les bruits de couloirs, que le groupe pensait avoir acquis Donkey Kong, mais je pense plutôt que Microsoft a acheté les compétences du studios, plus que ses licences…

Rare, la coquille vide ?

Rare de 2010 à 2015

Rare de 2010 à 2015

Pour beaucoup, Rare n’est que l’ombre de lui même. Et ce n’est pas faux. Les conversions de projet (Kameo) ainsi que les nouveaux projets (Viva Pinata et Perfect Dark Zero), sortent tard (sur Xbox 360), et n’ont pas le succès (ni la qualité) espéré par le public de Rare. Lorsqu’un Goldeneye s’est vendu à 8 millions d’exemplaire, et un Perfect Dark à 2,5 millions, un Kameo affiche 330.000 ventes et un Perfect Dark Zero 760.000 exemplaires vendus… Force est de constater que ces licences ne sont pas vendeuses, et Microsoft eu une très bonne idée : Intégrer le savoir faire en charadesign de Rare pour renforcer l’identité visuelle de la Xbox avec les Avatars Xbox !

Les avatars Xbox sont trop peu présens sur Xbox One à mon goût.

Les avatars Xbox sont trop peu présens sur Xbox One à mon goût.

Et ce fut un franc succès ! Ces avatars étaient d’ailleurs une des raisons qui faisait que je préférais l’univers Xbox 360 à celui de la PS3. Bien qu’inspiré par les Mii, les avatars Xbox 360 étaient assez originaux car implémentés dans pas mal de jeux (dont un accroché au Retro Viseur de Dirt 3) et même star de mini jeux, comme Motocross Madness sur Xbox 360… Mais surtout, ils étaient bien intégré à l’univers de la console, sur le Dashboard, et représentaient bien mieux nos amis que de simples « avatar » sous forme d’image… Et bien entendu, ils ont également participé à la « casualisation » de la Xbox 360, allant jusqu’à la sortie de Kinect et son Kinect Sport, réalisé par Rare, qui fut un carton planétaire (6 millions de ventes).

Une voie toute tracée pour Rare ?

Le logo de Rare depuis 2015

Le logo de Rare depuis 2015

Avec cet allié de taille, Microsoft allait pouvoir attaqué le marché des Casuals sereinement et manger des parts de marché à la Wii avec sa prochaine console : La Xbox One + Kinect 2.0 ! Une stratégie qui semblait bonne : La Wii, c’est 100 millions de consoles avec sa Wiimote, alors imaginez une console qui se contrôle simplement, à la voix et sans manette ! Kinect Sport 2.0 est développé dans la foulée par Rare… Pendant que Nintendo se mange les dents au sol avec sa Wii U, découvrant que le grand public est extrêmement volatile (et infidèle)…

Kinect Sports Rivals semblait être promu à un avenir brillant...

Kinect Sports Rivals semblait être promu à un avenir brillant…

La suite, vous la connaissez. La Xbox One bide auprès du grand public, est boudée par les gamers, et Kinect Sports Rivals sur Xbox One se vend à 400.000 exemplaires seulement… L’image de la console est alors réorientée pour les gamers, avec l’abandon de Kinect et des baisses de prix successives de la console, pour faire face au succès monstrueux de la PS4 de Sony. L’orientation de Rare va suivre celle-ci. Récupération de la licences Killer Instinct, sortie de Rare Replay, nouveaux projets ambitieux pour Rare… Il se pourrait bien que notre petit studio Anglais (qui fut l’un de mes studios préféré dans les années 90) fasse son retour en forces ces prochaines années !

Petit apparté : Les différents logos de Rare marquent les évolutions du studio. Ainsi, le nouveau logo de Rare, depuis 2015, signe un vrai retour au sources… Pour le meilleur ?

Conclusion ?

Pour répondre à la question de façon concrète : Oui, Nintendo était quasiment obligé de vendre Rare. Ayant perdu tout contrôle sur la structure, c’était la façon la plus simple de ne pas tuer le studio en coordonnant des décisions stratégiques pour le studio avec le concurrent, Microsoft. Est-ce que Rare aurait été dans une meilleure posture sous le giron de Nintendo ? Pas forcément, même si je pense que des projets comme StarFox Zero (Platinum Games) ou Donkey Kong Country Return (Retro Studio) aurait probablement été confiés à Rare. Est-ce que cela aurait été mieux pour l’industrie ? Pas forcément. Kinect fut tout de même une belle avancée en terme de reconnaissance de mouvement pour le grand public, et c’est en partie grâce à Rare que celle-ci a pu se développer.

Quoiqu’il en soit, j’ai hâte de voir Sea of Thieves en espérant secrètement que Rare se remette à briller de tout son or… Mais j’ai comme l’impression que cette fois-ci, Rare ne nous décevra pas 😉 !

Source : Culture Games, Newrare, Wikipedia, Generation-NT et Rare.co.uk