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Pipomantis quitte Gamekult : Quel avenir pour la presse vidéoludique ?

Pipomantis quitte Gamekult. Une actualité que je n’aurais pas forcément commenté en temps normal, seulement… Cela se passe quelques jours après la tourmente de Gameblog.fr. Alors, certes, ce n’est qu’un hasard du calendrier, mais ça en dit long sur ce que traverse actuellement la presse vidéoludique française :

Les temps changent.

Voici les mots de Pipomantis sur Medium.com, site sur lequel il tient son blog. Un très long article, dont je vous ai sélectionné les passages les plus importants ci-dessous :

En mars prochain, j’aurais dû fêter mes 17 ans de carrière dans la presse JV.
17 années passées par des blogs, des sites, de la presse papier, web, audio, vidéo ; et j’ai la prétention de penser que je n’y suis pas trop mauvais. De la sortie de la DS en 2005 jusqu’à la PlayStation 5 et ses rares exclusivités, en passant par des dithyrambes enflammées sur Metal Gear Solid, Katamari Damashii, Killer7, Super Meat Boy, Nuclear Throne, Bayonetta et autres F-Zero GX.
17 années (pas toujours brillantes, entendons-nous — surtout les premières) à jouer, dépiauter, analyser, comparer et surtout, transmettre cette espèce de feu qui m’anime depuis la plus petite enfance. Cette flamme du jeu, du ludique, de l’expérience inimitable dont on parle avec des étoiles dans les yeux et des trémolos dans la voix, que l’on veut absolument faire essayer aux copains.
Sauf que j’avais la chance que les copains en question forment des auditoires parfois gigantesques.

[…]

Et puis il y a eu Gamekult. La grosse machine. La publication dont je disais en rigolant à moitié qu’elle serait ma seule alternative possible après Canard PC, étant peu ou prou la seule à provoquer en moi autant d’admiration et de respect. Et puis c’était l’occasion de me retrouver avec mon doux Gauthier “Gautoz” Andres avec qui, au delà d’une belle amitié, nous partagions un podcast depuis déjà un petit bout de temps.
Presque quatre années, parfois intenses et difficiles, mais très souvent riches en découvertes et en fiertés. Au delà de certains passages obligés de la vie d’une rédaction (notamment les news, qui n’amusent pas grand monde), j’ai souvent pu y exprimer mon amour pour les jeux les plus insolites et méritants, d’Outer Wilds à Slay the Spire en passant par Return of the Obra Dinn ou DJMax, mais également faire le rigolo dans une émission hebdomadaire à la production épatante, ainsi que parler de mon amour pour l’Histoire du jeu vidéo avec Rétro Dash — assurément une de mes plus grandes fiertés.

Et aujourd’hui, je crois que c’est fini, que je n’ai plus la force de travailler pour une industrie aussi mal valorisée que celle-ci. La presse (a fortiori spécialisée, même si je pense très fort aux journalistes perdus dans les ilots des open spaces généralistes) est un métier de plus en plus difficile et de moins en moins bien rémunéré, où l’on fait charbonner des journalistes déjà précarisés jusqu’à les cramer en quelques années.

A 36 ans et après presque 17 ans d’une carrière que j’ose imaginer notable et un minimum respectable, je continue de vivre dans des studios de 20 à 25m², de compter à la fin de chaque mois, et d’angoisser pour mon avenir. Et ça n’est pas normal. Comme il est anormal de ne pas pouvoir prétendre à une simple chambre à coucher après toutes ces années.

[…]

L’actualité est devenue un robinet ininterrompu d’informations et de jeux à tester, que les rédactions essaient de suivre tant bien que mal, sans qu’aucune ou presque n’ait renforcé ses équipes éditoriales de manière significative. Si la situation était déjà critique depuis un petit bout de temps, elle est devenue absolument intenable lors de la pandémie et des confinements. En meilleure forme que jamais, le jeu vidéo a explosé de nombreux records pendant cette drôle de période, et on ne compte plus les news relatant les x10 ou x20 de certains développeurs ou éditeurs.
Pendant ce temps la presse, elle, continue de tourner à l’économie, de raboter, de pressuriser, de broyer. Cela a été particulièrement prégnant pendant la période de l’E3. Initialement, ce salon américain est l’occasion d’une semaine de boulot intense, où l’on ne compte pas nos heures, mais généralement dans la joie, la bonne humeur (et même une certaine ferveur), malgré la fatigue. Mais ces deux dernières années, ces quelques jours de boulot se sont transformés en trois, quatre semaines remplies d’annonces, d’effets de manche et de conférences annoncées au dernier moment à des horaires indus. Une situation proprement intenable pour une équipe d’une dizaine de personnes, aussi passionnées fussent-elles.

Et c’est sans compter une autre facette difficile du métier, amplifiée par l’arrivée et l’expansion — explosion ? — des réseaux sociaux : les lecteurs. Bien évidemment (tout du moins je l’espère), la grande majorité d’entre eux se garde de cracher son vitriol mais il y a cette minorité, bruyante, fielleuse, harceleuse, qui ne comprend absolument rien aux prérogatives du métier mais ne s’empêche pas pour autant d’insulter ou humilier des journalistes, parfois sur la simple base d’une note mal acceptée ou d’un orgueil chahuté. Les joueurs foutent la honte sur Internet, et ça n’a rien de nouveau. Mais un moment, à force de ne pas plier, on rompt. Et je crois que j’y arrive. Parce que je n’ai plus la force de subir cette ambiance délétère, de m’échiner à écrire pour des gens qui m’insultent, à plus forte raison quand le salaire et les conditions de travail ne suivent pas.

[…]

Merci, toutes et tous, infiniment. Pour ces presque 17 années à vous intéresser à mon avis sur des jeux, à envoyer des messages qui requinquent ou des cadeaux non mérités, et à soutenir cette presse qui, plus que jamais, a besoin de vous pour continuer à vous informer (surtout) et vous divertir (parfois). Ca semble un peu idiot et cucul mais une publication n’est rien sans ceux qui la lisent alors s’ils vous plaît, pitié, même si j’en pars aujourd’hui avec tristesse et amertume, n’arrêtez pas de soutenir votre presse et de payer pour de l’information de qualité. C’est grâce à vous et pour vous qu’on tient.

[…]

Merci d’avoir lu ce loooong texte très perso et un peu ouin-ouin (à moins que ça ne soit l’inverse), merci pour le soutien depuis toutes ces années, merci d’avance pour celui que j’aurai peut-être dans les années à venir. Mille bisous, prenez soin de vous ❤

(J’oublie volontairement la liste — longue comme le bras — des merveilleuses personnes qui m’ont aidé ou couvé pendant ces seize années. Vous vous reconnaîtrez, merci pour tout.)

Et comme toujours, beaucoup trop de parenthèses et de quadratins, on ne se refait pas.

Non, c’est toi qui raccroche.

Allez, à “trois”

un

deux

Pipomantis

Voilà. De mon côté, je ne peux que soutenir Pipomantis qui ne fait que dire ce que je constate, du haut de mon petit Otakugame.fr. Je connais également les difficultés de la presse vidéoludique (enfin des sites d’actualité de jeux vidéo), moi-même y ayant été confronté et « forcé » de faire une reconversion vers les réseaux sociaux, après 8 ans d’existence sur le web.

En effet, le secteur de la publicité sur Internet se porte mal. Entre les bloqueurs de publicité, et la dépendance extrêmement forte à Google pour générer du traffic, difficile de fidéliser ses lecteurs – d’autant que la concurrence avec les influenceurs sur Youtube ou Twitch est extrêmement féroce.

Mais que faire face à cela ? Ne sommes-nous pas tout simplement des reliques du passé ? Ne devons-nous pas tout simplement nous tourner vers l’avenir ? Même un site comme jeuxvideo.com pourra-t-il continuer d’être rentable sur le long terme ? Tant de question, si peu de réponses… En attendant, nous souhaitons à Pipomantis un bon repos et de vite retomber sur ses pattes : nous croyons en son talent !

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Ecrit par

Gamer depuis 1984, je suis un grand passionné de jeux vidéos. J'adore particulièrement les jeux japonais et je suis le fier fondateur d'Otakugame.fr !

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